Adaptations cérébrales structurelles et fonctionnelles chez les patients souffrant d’entorses latérales de la cheville et d’instabilité chronique de la cheville : Une revue systématique
Chakib Djellouli, formateur SSK, a lu et résume pour vous la revue systématique de Sports Medicine sur les adaptations cérébrales structurelles et fonctionnelles chez les patients souffrant d’entorses latérales de la cheville et d’instabilité chronique de la cheville.
Contexte
Les entorses latérales de la cheville représentent les blessures les plus fréquentes dans le milieu sportif, et elles sont associées à des taux de récidive particulièrement élevés. Environ 50 % des patients ayant subi une entorse latérale de la cheville développent par la suite une instabilité chronique de la cheville. Cette condition se caractérise par des dysfonctionnements persistants de l’articulation de la cheville, pouvant entraîner des séquelles à long terme.
Des études récentes suggèrent que des modifications au niveau du cerveau pourraient expliquer ces dysfonctionnements, ainsi que le risque accru de récidive. Cependant, la littérature scientifique actuelle manque d’une synthèse globale sur ces adaptations cérébrales.
Objectif
L’objectif principal de cet article est de présenter une revue systématique de la littérature sur les adaptations cérébrales structurelles et fonctionnelles liées aux entorses latérales de la cheville, en particulier chez les patients souffrant d’instabilité chronique de la cheville. Cette revue vise à mieux comprendre l’impact des lésions ligamentaires de la cheville sur le cerveau et à offrir des pistes pour une meilleure prise en charge des patients.
Méthodes
Un total de 20 articles a été inclus dans cette revue systématique, intégrant les données de 356 patients atteints d’instabilité chronique de la cheville, 10 patients ayant souffert d’une entorse latérale de la cheville, et 46 individus qualifiés de « copers » (patients ayant récupéré sans développer d’instabilité chronique).
Résultats
Les résultats montrent que des modifications de la microstructure de la substance blanche, notamment au niveau du cervelet, ont été associées aux entorses latérales de la cheville. Sur les 20 études, 15 ont rapporté des adaptations fonctionnelles cérébrales chez des patients souffrant d’instabilité chronique de la cheville, tandis que 5 articles ont identifié des altérations structurelles du cerveau.
Les principales zones cérébrales touchées sont :
- Le réseau sensorimoteur, impliquant le gyrus précentral et l’aire motrice supplémentaire (liés à la planification et à l’exécution du mouvement),
- Le gyrus postcentral (siège du traitement sensoriel),
- Le gyrus frontal moyen,
- Le cortex cingulaire antérieur dorsal, qui joue un rôle dans la gestion de la douleur et des processus attentionnels.
Ces altérations dans les réseaux neuronaux pourraient expliquer les déficits fonctionnels persistants observés chez ces patients, ainsi que le risque élevé de récidive.
Discussion
Les études incluses dans cette revue confirment que des adaptations cérébrales, tant structurelles que fonctionnelles, sont présentes chez les patients souffrant d’instabilité chronique de la cheville, comparativement aux individus en bonne santé ou aux « copers ». Ces modifications cérébrales sont corrélées avec les performances cliniques des patients, telles que la fonction autoévaluée de la cheville et les résultats des évaluations cliniques.
Ces découvertes suggèrent que la neuroplasticité induite par les entorses de la cheville pourrait être un facteur clé contribuant aux dysfonctionnements persistants et aux risques de récidive. En conséquence, les programmes de rééducation devraient inclure des stratégies visant à améliorer le contrôle sensorimoteur et moteur. Ces approches seraient essentielles pour contrer les adaptations cérébrales négatives liées aux entorses ligamentaires de la cheville.
Conclusion
Les adaptations cérébrales jouent un rôle crucial dans les conséquences à long terme des entorses latérales de la cheville et de l’instabilité chronique de la cheville. Les résultats de cette revue systématique mettent en lumière l’importance d’adapter les protocoles de rééducation pour intégrer des exercices de contrôle sensorimoteur afin de mieux répondre aux modifications cérébrales observées. Cela pourrait non seulement améliorer la fonction de la cheville, mais aussi réduire le risque de récidive et de complications futures.
Mots-clés : Entorse de la cheville, instabilité chronique de la cheville, adaptations cérébrales, rééducation, neuroplasticité, contrôle sensorimoteur.
Source
- Maricot, A., Dick, E., Walravens, A., Pluym, B., Lathouwers, E., De Pauw, K., Verschueren, J., Roelands, B., Meeusen, R., & Tassignon, B. (2023). Brain neuroplasticity related to lateral ankle ligamentous injuries: A systematic review. Sports Medicine, 53, 1423–1443. https://doi.org/10.1007/s40279-023-01834-z
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