Comprendre la thérapie manuelle neurodynamique : quand le nerf devient source de douleur – Une nouvelle lecture du système nerveux en kinésithérapie
La neurodynamique marque une évolution majeure dans l’approche thérapeutique des troubles musculosquelettiques. Cette discipline s’intéresse à la dimension mécanique du système nerveux : comment il bouge, réagit et interagit avec les structures qu’il innerve (muscles, fascias, peau…).
Le concept central ? Un nerf peut être impliqué dans une douleur sans qu’un déficit neurologique classique ne soit détecté. Cette idée s’est révélée essentielle dans des pathologies comme les épicondylalgies, les talalgies chroniques ou certaines cervicalgies.
Le nerf, un organe dynamique et sensible
Contrairement à l’idée d’un simple « fil électrique », le système nerveux périphérique est un tissu vivant, élastique, vascularisé et richement innervé. Il réagit à la compression, à la mise en tension, à la friction, voire à la vibration, générant une réponse nociceptive. Ce que Jan De Laere nomme la mécano-sensibilité du nerf est au cœur de la pathoneurodynamique.
Lors d’un mouvement, comme une flexion du coude ou une élévation de jambe tendue, les nerfs se déplacent, s’étirent, réduisent leur diamètre et subissent des variations de pression internes. Ces changements affectent leur vascularisation et leur conduction. Une altération de ces mécanismes peut générer douleurs, paresthésies et dysfonction motrice sans atteinte structurale visible.
L’examen neurodynamique : un outil de diagnostic fonctionnel
L’objectif de l’évaluation neurodynamique est d’identifier si les nerfs sont impliqués dans une douleur d’apparence musculosquelettique. Les séquences neurodynamiques sont des mises en tension progressives, multi-articulaires, qui cherchent à reproduire les symptômes du patient. Associés à des manœuvres de sensibilisation (compression, mise en charge, percussion), ils aident à différencier une douleur d’origine nerveuse d’une douleur tissulaire ou articulaire classique.
Le praticien doit également évaluer :
- l’irritabilité des tissus nerveux (niveau de stimulation nécessaire à la douleur),
- l’état de la vascularisation,
- la capacité de glissement du nerf dans son interface (canaux, fascias, muscles),
- les facteurs contribuant : posture, stress, antécédents traumatiques…
Une approche globale pour des pathologies complexes
La thérapie manuelle neurodynamique trouve des indications précieuses dans de nombreuses situations cliniques :
- Syndromes canalaires (tunnel carpien, canal d’Albini, thoracic outlet…),
- Névralgies cervico-brachiales sans signes neurologiques typiques,
- Lombalgies chroniques avec irradiation atypique,
- Épicondylites et tendinopathies récidivantes,
- Fibroses post-chirurgicales ou post-traumatiques.
Elle nécessite une vigilance particulière vis-à-vis des drapeaux rouges (douleurs nocturnes, perte de poids, signes neurologiques étendus) qui peuvent orienter vers des causes organiques plus graves et justifier une réorientation médicale.
Vers une kinésithérapie intégrative et raisonnée
Jan De Laere propose un véritable changement de paradigme : ne plus considérer les nerfs uniquement comme des messagers, mais comme des structures mécaniquement sensibles, dont la souffrance peut expliquer bien des douleurs dites « fonctionnelles ». En intégrant l’examen neurodynamique au bilan classique (orthopédique, neurologique, palpatoire), le kinésithérapeute affine son diagnostic, adapte son traitement et surtout, anticipe les échecs thérapeutiques.
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Sources
- Jan De Laere, Thérapie manuelle neurodynamique – du bilan diagnostique au traitement manuel, publié dans Profession Kinésithérapeute n°25.
- Article original : http://www.tmno.ch/resources/TMND1.pdf