Cervicalgies : Quels Tests Cliniques Révolutionnent Votre Précision Diagnostique ?
La douleur cervicale et les troubles associés (NAD) représentent une condition musculo-squelettique fréquente et l’une des principales causes d’incapacité à l’échelle mondiale, affectant 30 à 50 % des adultes chaque année. Souvent, l’origine anatomique spécifique de la douleur reste difficile à identifier, et les recherches antérieures n’ont pas établi de relations définitives entre les plaintes de douleur cervicale et les résultats de l’imagerie. Dans ce contexte d’hétérogénéité et de complexité multifactorielle, il est essentiel pour les kinésithérapeutes d’améliorer leurs capacités diagnostiques et leur reconnaissance des caractéristiques cliniques communes.
Cet article explore les preuves actuelles concernant l’utilité diagnostique des caractéristiques cliniques pour les cervicalgies et leurs troubles associés, en s’appuyant sur un aperçu des revues systématiques récentes.
La Douleur Cervicale Mécanique : Au-delà du Subjectif
Pour la douleur cervicale mécanique, qui peut inclure les dysfonctions musculaires, articulaires ou neurales, plusieurs éléments cliniques se distinguent :
Rapports Subjectifs
Des symptômes tels que la radiculopathie de la main et l’engourdissement de la main présentent de bonnes spécificités (0,89–0,92) pour le diagnostic de l’hypertrophie des facettes et des articulations uncinées. Cependant, leurs faibles sensibilités (0,10–0,15) suggèrent qu’elles sont plus utiles pour confirmer la condition lorsqu’elles sont présentes que pour l’exclure lorsqu’elles sont absentes. Les maux de tête, la raideur du cou ou la référence à l’épaule, rapportés subjectivement, ne montrent pas de déplacement statistiquement significatif de la probabilité pour diagnostiquer la dégénérescence discale, l’arthrose facettaire ou l’hypertrophie uncinée. Une revue a rapporté que 36 % des douleurs cervicales étaient d’origine facettaire et que 83 % des segments provocateurs étaient correctement prédits par la cartographie de la distribution de la douleur, confirmée par des blocs diagnostiques.
Évaluation Manuelle
L’évaluation manuelle, notamment les tests de mouvement intersegmental passif (PAIVM), montre une bonne validité groupée pour identifier la douleur articulaire (Sensibilité : 0,90 ; Spécificité : 0,73). La sensibilité mécanique mesurée par l’algométrie de seuil de douleur à la pression a également démontré une bonne sensibilité (0,88) et une spécificité modérée (0,61). La palpation articulaire a une sensibilité similaire (0,89 à 0,92) mais une spécificité plus faible (0,47 à 0,71) par rapport aux blocs des branches médianes.
Test d’Extension-Rotation (ERT)
Pour le diagnostic de la douleur facettaire, l’ERT a une sensibilité de 0,83 et une spécificité de 0,59. L’ERT combiné à des résultats positifs à l’évaluation manuelle (raideur articulaire et sensibilité musculaire segmentaire palpable) améliore considérablement la précision diagnostique, augmentant la spécificité à 0,83 et le rapport de vraisemblance positif (+LR) à 4,71. Les injections diagnostiques sont actuellement la norme de référence pour la douleur facettaire, mais des méthodes de test moins invasives sont recherchées. L’évaluation manuelle et l’ERT combinés peuvent offrir des résultats comparables aux injections diagnostiques.
Force, Coordination et Endurance Cervicale
Les tests tels que le Cranio-Cervical Flexion Test (CCFT) révèlent des différences significatives de performance entre les sujets souffrant de douleur cervicale et les contrôles sains. Les sujets atteints de douleur cervicale non spécifique montrent une activation diminuée des fléchisseurs cervicaux profonds et une activation accrue des muscles sternocléido-mastoïdiens et scalènes antérieurs. Les patients atteints de douleur cervicale chronique présentent une faiblesse significative en flexion, extension et flexion latérale cervicale par rapport aux contrôles. Cependant, il manque de données suggérant que ces tests peuvent impliquer des structures spécifiques comme facteurs causals.
Imagerie Diagnostique
L’imagerie est incohérente pour prédire la douleur cervicale ou la dysfonction. Les anomalies sont souvent présentes chez les sujets pathologiques et les contrôles sains [21–23, 26, 40, 49]. Bien que l’imagerie puisse identifier des changements structurels (comme les protusions discales de haut grade ou la sténose foraminale) qui peuvent être associés à une réduction ou un risque accru de douleur cervicale à long terme, il n’y a pas de relation causale claire entre ces changements et les symptômes [14, 36–38, 41, 43, 44, 58]. La discographie de provocation a suggéré que 16 à 53 % des cas de douleur cervicale chronique sont d’origine discogénique, et 41 à 55 % sont attribués aux articulations facettaires.
Troubles Associés au Coup du Lapin (WAD)
Pour les WAD, caractérisés par une combinaison de symptômes suite à un mécanisme d’accélération-décélération :
Imagerie et Morphologie
Les modifications morphologiques de la section transversale (CSA) et de l’infiltration graisseuse musculaire (MFI) peuvent être visibles à l’IRM. Cependant, les résultats sont incohérents entre les revues, et les preuves sont insuffisantes pour affirmer que ces changements contribuent directement à la douleur cervicale. Des MFI accrus dans les extenseurs cervicaux chez les personnes blessées par coup du lapin après un accident de voiture étaient associés à 21 fois plus de chances d’avoir un mauvais pronostic à trois mois. Pour les WAD aigus, il y a une augmentation des chances de déformations musculaires et de fractures occultes du corps vertébral à l’IRM.
Historique Subjectif
Une anamnèse approfondie est cruciale pour déterminer le mécanisme de la blessure (par exemple, chute ou accident de voiture) et exclure d’autres diagnostics potentiels.
Instabilité Cervicale : Dépistage et Imagerie Avancée
L’instabilité cervicale est l’incapacité de la colonne cervicale à maintenir son schéma normal de déplacement sous des charges physiologiques.
- Règles Canadiennes de la Colonne Cervicale (CCR) et Critères NEXUS : Ces règles sont d’excellents outils de dépistage pour exclure la nécessité d’une imagerie en cas de fracture ou d’instabilité cervicale. Les CCR ont démontré une sensibilité élevée (0,90 à 1,0) et une valeur prédictive négative (VPN) de 100 % lorsqu’elles sont utilisées par les médecins et les infirmières. Les CCR ont une puissance de dépistage supérieure à celle des critères NEXUS.
- Test de Sharp-Purser (SPT) : Le SPT a une fiabilité médiocre et une précision diagnostique limitée pour l’instabilité cervicale, et ne devrait pas être utilisé de manière isolée.
- Imagerie Diagnostique : Les lésions ligamentaires sont les blessures les plus fréquemment détectées par IRM après un traumatisme contondant. La tomodensitométrie (CT) est plus appropriée que les radiographies simples pour détecter les fractures de l’apophyse odontoïde ou des condyles occipitaux et les désalignements cervicaux supérieurs, en raison de sa plus grande sensibilité. L’IRM combinée à des radiographies statiques et dynamiques est considérée comme nécessaire pour évaluer l’intégrité du complexe disco-ligamentaire des deuxième et troisième vertèbres cervicales, fournissant des informations complètes sur les blessures ligamentaires et l’alignement osseux.
Conclusion pour le Kinésithérapeute
Les preuves récentes soulignent la complexité du diagnostic des causes mécaniques spécifiques des cervicalgies. L’imagerie diagnostique est souvent peu concluante pour prédire la douleur ou la dysfonction, et les anomalies peuvent être présentes chez les individus symptomatiques et asymptomatiques.
Pour une approche diagnostique optimisée :
- Intégrez l’anamnèse subjective (radiculopathie, engourdissement de la main) avec des tests physiques ciblés pour affiner le diagnostic des changements dégénératifs.
- Utilisez l’évaluation manuelle positive et l’ERT, surtout lorsqu’ils sont combinés, pour une validité diagnostique modérée à élevée de la douleur facettaire, potentiellement comparable aux injections diagnostiques.
- Faites confiance aux CCR et aux critères NEXUS pour exclure avec confiance la nécessité d’une imagerie en cas d’instabilité traumatique, avec une supériorité des CCR.
- Soyez prudent avec le SPT en isolation pour l’instabilité cervicale.
- Lorsqu’une instabilité est suspectée, l’imagerie avancée (CT, IRM avec radiographies dynamiques) est cruciale pour une évaluation précise des fractures et des lésions ligamentaires.
La recherche future doit continuer à explorer des critères diagnostiques différentiels pour les structures spécifiques contribuant à la douleur cervicale, tout en reconnaissant la nature multifactorielle de la douleur et l’influence des facteurs psychosociaux.
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Sources
- Titre : An overview of systematic reviews investigating clinical features for diagnosing neck pain and its associated disorders
- Auteurs : Brandon C. Williams, Scott W. Lowe, Ryan C. McConnell & Joshua A. Subialka
- Source : Journal of Manual & Manipulative Therapy, 33:4, 286-298. DOI: 10.1080/10669817.2024.2436403 (2025)